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Arbuste du futur n°2 : L’Heptacodion de Chine

Yves Darricau, agronome, apiculteur et planteur d’arbres


Heptacodium miconioides est une introduction récente qui tient d’un quasi miracle : une belle réussite pour les jardins et la biodiversité.

L’Heptacodion est un arbrisseau de la famille du chèvrefeuille, de 4 à 8 mètres de haut, souvent à troncs multiples, avec des feuilles en corne de gazelle, une jolie écorce claire qui s’exfolie en lanières, et une floraison automnale longue, suivie d’une fructification tardive et particulièrement décorative : ses sépales rougissent à la tombée des pétales et prolongent son intérêt esthétique. C’est un passe-partout que l’on pourra isoler ou inclure dans des massifs et des haies, taillé ou en port libre.


Heptacodium miconioides, Meyzieu, Parc République. (© photo Romain Béhar)
Heptacodium miconioides, Meyzieu, Parc République. (© photo Romain Béhar)

Une redécouverte chanceuse

Il a initialement été découvert en 1907 par le chasseur de plantes britannique Ernest Henry Wilson qui travaillait pour l’Arnold Arboretum de l’Université d’Harvard. Wilson l’a trouvé dans les montagnes du Hubei, au centre de la Chine1. Il était déjà rare à l’époque, et n’ayant plus été observé par la suite, on le considéra disparu. Il faudra attendre plus de 70 ans pour que l’Heptacodion soit “redécouvert”, en 1980, lors d’une expédition de recherche sino-américaine dans les collections du jardin botanique de Hangzhou. L’oublié du fond du jardin permit la récolte de graines mises en culture aux États-unis et plus tard en Europe.

Parallèlement, les botanistes chinois découvrirent de rares spots isolés en milieu naturel où sa survie est en jeu, entre activités humaines destructrices et changement climatique. La dernière fois qu’il a été étudié dans la nature, en 2005, il ne restait que neuf populations, toutes fortement menacées par la perte de leur habitat. Les botanistes chinois mirent également en place des collections et des campagnes de replantations, et l’espèce bénéficie désormais d’une protection nationale en Chine. Sa survie est maintenant assurée grâce à cette migration-conservation.


Résilience et qualité mellifère

La mise en culture de l’Heptacodion a permis de découvrir sa capacité d’adaptation à diverses contraintes (froid jusqu’à -20°C, sécheresse, large amplitude de sols sauf très mouillés) et son étonnante floraison blanche, longue, tardive (septembre) et parfumée, suivie d’une superbe coloration rouge de ses sépales, l’habillant comme une seconde floraison. Des caractéristiques idéales pour un bel avenir horticole.

Floraison tardive, en septembre. (Ile-et-Vilaine, © Yves Darricau)
Floraison tardive, en septembre. (Ile-et-Vilaine, © Yves Darricau)
Superbe coloration rouge des sépales après floraison. (© Yves Darricau)
Superbe coloration rouge des sépales après floraison. (© Yves Darricau)

Enfin, on se rend compte de la richesse de sa floraison pour quantité d’insectes (pollinisateurs et autres) qui se pressent pour récolter pollen et nectar, transformés en réserves corporelles pour passer au mieux la saison hivernale. Il est crédité par les apiculteurs coréens d’une importante production de nectar estimée à 70 kg par hectare ; un quasi-exploit à cette époque de creux floral, juste avant la floraison des lierres2. Son attractivité est spectaculaire, à tel point que nos voisins anglais le baptiseraient volontiers “arbre à bourdons”. A vrai dire un nom plus vendeur ! On le trouve en pépinière, et il est également facile à bouturer et à conduire.

Une ressource en pollen et nectar pour préparer l'hivernage. (© Yves Darricau)
Une ressource en pollen et nectar pour préparer l'hivernage. (© Yves Darricau)
Diptère aspirant du nectar de l'Heptacodion de Chine. (© Yves Darricau)
Diptère aspirant du nectar de l'Heptacodion de Chine. (© Yves Darricau)

Epilogue

L’Heptacodion est l’archétype de « l’arbuste du futur » : beau, robuste et stratégique pour la biodiversité avec sa floraison nourricière en phase avec les besoins de l’entomofaune. Il préfigure les introductions végétales à venir, priorisant la sélection de critères floraux utiles pour la biodiversité. La richesse des flores tempérées du monde augure bien de la réussite des missions botaniques qu’il faut vite reprendre pour ramener d’autres « champions » !


1- John Grimshaw, Heptacodium miconioides, Year book 2012, International Dendrology Society : https://www.dendrology.org/publications/tree-of-the-year/heptacodium-miconioides-2012/

2- Sung-Joon Na, Ji-Min Park, Young-Ki Kim, 2024. “Selection of Urban Trees to Enhance Pollinator Food Resources” https://doi.org/10.20944/preprints202409.0153.v1

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