Article rédigé par Laure Rogeau et Daniel Gerard, arbusticulteurs et respectivement pépiniériste et ornithologue.
Liste d'arbustes établie par Daniel Gérard, Irène Guillet et Laure Rogeau
Et si le premier espace naturel était votre jardin ?
Tout jardin qui se respecte, à notre avis, devrait comporter son lot d’arbustes, de différents profils, depuis les suffrutescents ou couvre-sols jusqu’aux ports arborescents.
Certains de ces arbustes, tiennent une place, parfois importante dans tout ou partie de la niche écologique des oiseaux d’Europe.
Rappelons que la niche écologique d’une espèce décrit la manière dont cette espèce interagit avec son environnement, à la fois biotique et abiotique. Les dimensions principales de la niche écologique sont :
Les ressources utilisées : Nourriture (type, quantité, manière d’acquisition) et habitat (lieu de vie : arbre, sol, eau, etc.).
Les conditions environnementales : Température, humidité, luminosité, salinité, pH, etc., qui de finissent les conditions ou l’espèce peut survivre et se reproduire.
Les Interactions interspécifiques.
On comprend donc aisément le rôle fondamental tenu par les arbustes, pour satisfaire les besoins biologiques des oiseaux.
Un rôle nourricier
La manière la plus évidente dont les arbustes rendent service aux oiseaux est bien sûr la production de fruits et/ou de graines. Dans la majorité des cas, ces fruits sont disponibles en automne pendant la période de migration, très énergivore, ou en hiver. Ils représentent alors une ressource précieuse, durant les frimas de l’hiver, et en l’absence d’autres ressources comme les invertébrés.
Ainsi, les Amélanchiers, par exemple, fourniront des baies en fin de printemps, dont se régaleront certains oiseaux amateurs de baies comme le Merle noir ou encore la Fauvette à tête noire.
En été, les petits fruits rouges seront appréciés de certains columbidés notamment.
En automne, la Grive mauvis se ressourcera en consommant les précieuses baies de Crataegus, ou encore Viburnum. Certaines aubépines conservent leurs fruits assez longtemps durant l’hiver.
Les fruits les plus persistants seront prélevés par les oiseaux (qui adaptent alors leur régime alimentaire). Citons parmi ces arbustes à fructification tardive : les Callicarpa, Ligustrum …
Les fruits secs (Noisetiers) sont également exploités par les Pics ou la Sittelle torchepot par exemple.
Les arbustes dont la fructification n’est pas exploitée ne sont pas en reste. Ils peuvent héberger toute une cohorte d’invertébrés, au rayon desquels les insectes tiennent une place prépondérante. Plus étonnant encore, certains oiseaux consomment du nectar, voire des tissus végétaux comme les pétales de fleurs (Perruche à collier).
Des relations trophiques parfois complexes, dont les oiseaux sont bénéficiaires, s’établissent autour des arbustes dans nos jardins ou encore dans les espaces publics. Contre toute attente, les arbustes d’origine exotique, ou les déclinaisons horticoles (cultivars), s’ils sont bien choisis, seront eux aussi très appréciés de nos amis ailés. Ainsi, il serait dommage de renoncer aux aspects ornementaux des arbustes, sous un prétexte écologique, ici erroné, qui conduit souvent à n’utiliser que des végétaux indigènes…
Notons également des « convergences écologiques » troublantes, comme l’exemple de Euonymus europaeus régulièrement victime d’attaques en règle de ravageurs spécialisés : les Hyponomeutes du Fusain (Yponomeuta cagnagella, Yponomuta plumbella, et Yponomeuta irrorella).
Durant l’attaque, certains passereaux se régaleront des chenilles, même si d’autres les délaissent. D’autres insectes qui parasitent ces chenilles, représenteront également une ressource pour les oiseaux insectivores. Le Gobe-mouche gris sera un prédateur efficace des imagos (papillons).
Les formes dormantes en hiver sont consommées lors des rondes de passereaux (Mésanges, Roitelets, Pouillots, etc.), que l’on peut ici considérer comme des auxiliaires.
La défoliation du Fusain, en fin de printemps, est suivie d’une re foliation, floraison, et fructification. Cette fructification un peu plus tardive intervient alors à une période plus intéressante pour les oiseaux hivernants. Une opération pas très inquiétante pour le Fusain et très intéressante pour les oiseaux.
Bien entendu de bonnes pratiques de taille raisonnée, permettront d’obtenir des floraisons, et fructifications abondantes.
Une utilité pour la nidification
C’est là que nous pouvons introduire la notion de strates. Les arbustes prennent différentes fonctions paysagères, depuis le couvre-sol jusqu’au marqueur d’espace assez haut et parfois délimitant dans le jardin. Certains se substitueront avantageusement à de petits arbres.
Or les oiseaux, selon leur espèce, nichent au sol, ou très près du sol (Pouillot véloce, Pouillot fitis…), à mi-hauteur (Rouge-gorge familier) ou beaucoup plus haut (Pinson des arbres…).
Si l’on souhaite favoriser la nidification d’oiseaux dans son espace, plusieurs paramètres sont à prendre en compte dans le choix des arbustes, comme leur hauteur, leur densité, leur position par rapport aux bâtis, et l’agencement des arbustes entre eux.
Notons enfin que les arbustes acrotones et mésotones seront privilégiés par les oiseaux pour établir leur nid. De manière singulière, le Bambou peut néanmoins accueillir des nidifications de passereaux (inaccessibles pour les mammifères prédateurs).
Un rôle en faveur de la sécurité
Les arbustes, surtout s’ils présentent une ramification dense, permettent aux passereaux de se tenir à l’abri des regards, et de se réfugier en cas d’attaques de leurs prédateurs, comme l’Épervier d’Europe.
La présence d’arbustes à feuillage persistant et dense à proximité des mangeoires hivernales est vivement recommandée… Les arbustes épineux assureront d’autant plus efficacement cette fonction sécuritaire.
Les arbustes : des perchoirs stratégiques pour les oiseaux
Les arbustes constituent également d’excellents perchoirs, choisis par les mâles pour chanter ostensiblement dans le but de séduire leurs congénères femelles ou d’imprimer les limites de leur territoire. Rouge-queue à front blanc et Accenteur mouchet apprécient de chanter ainsi bien en vue. Le Rossignol philomèle, visuellement plus discret, fait confiance à son chant puissant et s’exprime depuis les enchevêtrements de branches des végétaux arbustifs.
Nous pouvons encore mentionner les Mésanges qui utilisent les arbustes à proximité des mangeoires pour bloquer une graine contre un rameau, entre leurs pattes, et les décortiquer.
Des services rendus, même après la phase d’usage
Après la taille, les rémanents fournis par les arbustes seront broyés et le BRF obtenu constituera un paillis régulièrement visité et exploité par les insectivores.
Autre option : assembler les branchages dans des haies de Benjes, qui accueilleront les nidifications de quelques passereaux. Ces aménagements sont irrésistibles pour le Troglodyte mignon, ou le Rouge-gorge familier.
Les arbustes indigènes, exotiques et ornementaux apportent une contribution essentielle à la biodiversité lorsqu'ils sont bien choisis et entretenus. Ils offrent nourriture, abri, refuge et tranquillité aux oiseaux tout en embellissant nos espaces. Comme toujours, la diversité, de strates, de textures, de ports, de volumes, sera la clé d’une biodiversité augmentée. Une taille raisonnée, dont la première option est de ne pas tailler, permet de maximiser ces bénéfices, en garantissant une floraison et une fructification optimales. En intégrant ces principes dans nos jardins et espaces publics, nous participons activement à la préservation de la faune locale et à l'équilibre écologique. Alors n'attendez plus pour planter des arbustes !
Voici une liste d'arbustes intéressants pour les oiseaux selon les critères détaillés ci-dessus. Cette liste n'est bien sûr pas exhaustive.
Si vous souhaitez partager votre expérience d'autres arbustes appréciés par les oiseaux, n'hésitez pas à nous en faire part, nous en tiendrons compte lors de la prochaine mise à jour de cette liste !
Cette liste est disponible au format tableur aux adhérents Arbusticulteurs sur simple demande.
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